T'es la troisième cette semaine ! [PV maxine]

Des grincements. Encore des grincements jusqu’au petit matin. Allongée dans mon lit, j’observe le plafond tout en me demandant si ça va s’arrêter un jour. Foutu voisin et sa vie sexuelle intense. Pour le coup, j’en ai réellement marre. J’ai des cours, moi, et même si l’année vient de commencer et que je n’ai pas encore beaucoup de devoirs ni de contrôles, j’ai bien l’impression que je ne saurais jamais m’en sortir si je dois continuer à avancer à reculons parce que je ne dors pas la nuit. Entre mes insomnies dues au fait que je suis tout à fait certaine que Père va me tuer quand il apprendra que j’ai choisi ma propre voie au lieu de faire ce qu’il me disait… Enfin, maman est au courant. Elle a toujours été là pour moi, elle. Elle m’a toujours soutenue et elle a bien vu que je dépérissais, dans ma voie de garage pour devenir la parfaite petite doublure de Nerwën.  

Mais, je ne suis pas cette petite doublure parfaite, et je ne le serais certainement jamais.

Je tourne la tête vers mon réveil dont la lueur blafarde m’indique qu’il est un peu plus de cinq heures du matin. Avec un grognement, je mets l’oreiller sur ma tête. Maintenant que les grincements sont terminés, je dois avouer que je ne suis pas tout à fait prête à m’endormir. Mon cerveau fonctionne trop pour que j’arrive à me poser quelques heures et à dormir. Je soupire un coup et jette l’oreiller dans la chambre – pas super bien rangée d’ailleurs – avant de m’asseoir.

Deux minutes plus tard, toujours en grognant, je suis en train de m’habiller. Un short gris moulant, un débardeur rose bonbon. Pas de soutien-gorge, mais un brassard sur le bras droit dans lequel je range mon iPod. Mes écouteurs bleus sur les oreilles, je me dirige vers la porte de ma chambre, la musique me réveillant d’un seul coup et chassant la fatigue. Une fois dans le hall, j’enfile une paire de chaussettes pas super propres et mes baskets de course. Je sors dans le couloir en claquant la porte dans mon dos. Ma sœur m’ouvrira quand je rentrerais.

Dans le couloir, je vois une fille sortir de l’appartement du voisin. Encore une. Avec un grognement je me décide à lui faire comprendre qu’elle n’a rien à faire là. Rien du tout. Parce que, ce mec, il n’en faut pas la peine : vraiment pas. Il se tape tout ce qui bouge sans aucune exception et je n’ai pas l’intention de lui faciliter la tâche. T’es la troisième cette semaine, tu sais ? Je vois ses épaules se raidir et je me fige en ouvrant grand la bouche. Attendez. Je la connais cette fille. Je me mords la lèvre inférieure presque jusqu’au sang et secoue la tête. Attends… Max ? Oh merde. Et moi qui n'ai pas pris mes clefs pour aller me cacher sous ma couette. C'est malin.

Depuis que Leo et mois nous sommes mis d’accord sur l’endroit de nos ébats, je dois avouer que ma vie  ne ressemble plus vraiment à celle de la parfaite étudiante. Je mens à ma famille, mes amies et surement à moi-même en n’acceptant qu’une simple relation physique. Mais le couperet est tombé.  Pap’s m’a fait comprendre que le duplex familial n’était pas un simple motel et depuis je tente de rentrer en douce sans être vu, (un peu comme une gamine), ce qui se révèle être le parcours du combattant surtout lorsque je reste toute la nuit chez Léo.
Comme maintenant.
Après un dernier baiser, je décide de quitter le lit et de me rhabiller. Vingt minutes plus tard, j’arrive enfin à m’extraire des bras de mon patron et de son appartement. La porte à peine claquée et tandis que je sors mon téléphone pour mettre un peu de musique dans mes écouteurs, une voix de femme m’interrompt dans mon geste.

-T’es la troisième cette semaine, tu sais ?

Sur le point de répondre d’une manière assez désobligeante, (à savoir que je n’ai que faire de son avis ou de ses mises en garde) je  me fige lorsque la nouvelle venue semble me reconnaitre.

-Attends… Max ?

-Linn.

Merde… Quelles étaient les probabilités pour que l’une des élèves du collège habite dans cette tour de riches et puissants homme d’affaires ? Situation gênante du jour, bonjour.

-Je…

Pour le coup, je ne sais pas quoi dire. Au vu de l’heure, de ma tête d’après nuit de folie,  je ne vois pas vraiment ce que je peux dire.

-Comment ça va ?

Faites qu’elle ne m’ait pas entendue, faites qu’elle ne m’ait pas entendue, faites… Oh merde la boulette. Elle se retourne vers moi et j’ai confirmation. C’est bel et bien Maxine. Je ne la connais pas vraiment, juste assez pour la reconnaitre. En fait, nous sommes dans la même maison. Mais, c’est en même temps plus compliqué que ça. Même maison ne signifie pas mêmes cours, et s’il y a déjà eu quelques évènements où nous avons été ensemble, je ne sais pas qui elle est derrière le masque. Ni ce qu’elle faisait chez mon voisin.

Enfin.

Si, ça je le savais. Elle m’empêchait de dormir. Encore heureux qu’elle ne soit pas aussi bruyante que certaines autres, parce que pour le coup je me serais sentie super mal de l’avoir entendue. Le rouge me monte aux joues à cette pensée et je jette un regard à la porte de l’appartement. Je suis sûre qu’en courant assez vite je peux passer au travers. Non ? Toujours pas ? Bon, tant pis.

J’ai envie de disparaitre. Quelle gaffe j’ai fait. Et, visiblement, dans le silence qui s’éternise, Max non plus ne sait pas réellement quoi dire. Je me mords la lèvre inférieure et soupire. Il faut bien que l’une de nous deux ouvre le bal parce qu’on risque de rester dans cette situation encore longtemps. C’est elle qui ouvre le bal avec une question pour le moins incongrue. Pas vraiment ce à quoi je m’attendais. Pas du tout en fait. heu. J’hésite entre la vérité et l’explosion de rire. Bon sang, on est dans la situation la plus incongrue du monde et… Et elle me demande si ça va ? Oui… Je crois. Et toi ? Mes épaules se secouent lentement d’un rire silencieux, tout de même. C’est risible comme situation ? Et puis, je laisse échapper un bâillement et me frotte les yeux. Je vais bien, mais qu’est ce que je suis crevée moi ! Donc, toi et le voisin... Curieuse ? Ouais, totalement.

Je n’allais pas mentir. Là tout de suite, j’hésitais entre courir jusqu’à l’ascenseur pour quitter l’immeuble ou bien frapper à la porte de Léo jusqu’à ce qu’il m’ouvre. Mais bon, quelque soit la solution que je choisissais, aucune ne pouvait effacer ce merveilleux moment.

-Oh euh, ça va moi aussi..

J’avais juste une furieuse envie de me fondre dans le mur comme aurait pu le faire un caméléon ou un sorcier comme dans la collection que j’avais lu plus jeune, Harry Potter. Bref, je voulais disparaitre. Encore plus en entendant la question de Linn, une question pas vraiment dites mais qui suffisait à me faire rougir puissance mille.

-Donc moi et ton voisin, on…

Qu’est-ce que je pouvais dire ? Cette relation qui n’en était pas une devait rester secrète, non seulement parce qu’il était mon maitre de stage et que travailler à domicile n’était pas vraiment l’une des taches notifiées dans la convention mais également et surtout parce que son rang pouvait entrainer une réaction en chaine qui se finirait à coup sûr dans les médias.

-On est ami.

Oui, bon clairement ce petit mot laissait sous-entendre quelque chose de totalement différent mais je n’allais quand même pas lui dire crument la réalité des choses ? Imaginez un peu sa tête « Léopold De Rothschild est mon patron, on entretient une relation purement physique ce qui, à priori, explique le fait que je suis la troisième cette semaine »
Non, vraiment, je ne pouvais pas dire ça et puis c’était humiliant. D’être la troisième j’entends.

Même si je savais pertinemment qu’il n’y avait rien entre nous, c’était un peu douloureux de savoir qu’il y’en avait d’autres avant moi et qu’il y’en aurait d’autres après moi. Au final, je comprenais maintenant pourquoi tout le début de notre relation avait eu lieu dans son bureau. Chez lui, il avait déjà de quoi satisfaire ses envies…

Cette réalité me frappa si soudainement que je n’avais plus envie de faire semblant sur quoi que ce soit. Je n’en avais plus la force. J’avais accepté cette relation mais là, tout de suite, je n’arrivais pas à l’assumer.

-Bon ba…Je… Je pense que je devrais y aller.

Mais dans quelle galère est ce que je me suis mise moi … Dans quelle galère est ce que je peux être en cette seconde. Pourquoi est ce que je n’ai pas pris mes clefs ? J’aurais pu rentrer dans l’appartement en prétextant… N’importe quoi. Mon regard attrape le plafond, puis retombe sur la fille en face de moi. Je me demande bien ce qui m’a pris de vouloir aller courir, tient. J’aurais mieux fait de rester sous ma couette, fatigue ou pas fatigue ! Parce que, cette situation, pour être franche, je n’ai aucune envie de me retrouver face à elle. Non, vraiment pas. Déjà quand les filles sortent et que je les croise, j’aime bien les envoyer bouler, alors si en plus de ça, c’est une fille que je connais… Non mais sérieusement, à quoi elle pensait. J’écoute ses paroles sans réellement les entendre. En fait, mon esprit épuisé est ailleurs. Je me demande si elle est déjà venue ici. Ou si elle va revenir. Si je ne lui ai pas cassé son cou. Quelque chose comme ça. Je me mordille la lèvre inférieure, encore une fois. C’est un véritable tic chez moi. Dès que j’ai du mal avec une situation, je me mordille les lèvres. Encore et encore. Amis ? Etrange remarque. Moi, je ne couche pas avec mes amis. Sauf si elle était là pour jouer à chat. Qui sait. Le monde est fou alors… Un peu plus ou un peu moins. Pour être franche, j’y croirais presque.

Cependant, alors qu’elle parle, je m’intéresse un peu plus à elle. A son expression, par exemple. On dirait qu’elle vient de se prendre une claque. Une sacré claque. Et, quand elle me dit qu’elle doit y aller, je ne peux pas m’en empêcher, j’avance et traverse l’espace qui nous sépare. Je l’attrape dans mes bras et la serre contre moi. Je ne sais pas ce qu’il m’a pris. Mais, j’ai eu l’impression que c’était ce dont elle avait besoin. J’aimerais pouvoir dire que je suis désolée de ma gaffe, parce que c’en était une belle, mais je n’y arrive pas. Je la serre donc contre moi durant dix secondes et demi. Pas plus. Des fois qu’elle m’en veuille. Et puis, je la relâche et hausse les épaules. T’en fait pas, je les ferais toutes fuir. Un sourire sur mes lèvres, je ne me laisse pas déstabiliser. Ce n’est pas parce que je suis célibataire en ce moment que je ne comprends pas ce que c’est. Son expression, je la comprends. C’est ce moment où on réalise qu’en fait, notre « mec » est un connard. J’ai déjà commencé. Histoire de pouvoir dormir la nuit.Ouais, parce qu'il s'amuse bien le voisin. Mais, ça on va éviter de le dire à voix haute. Ce serait le genre de boulette qu'on me reproche généralement. Je suis une vraie gaffeuse. Je suis une énorme gaffeuse, et je n'arrive jamais à me rendre compte de mes gaffes avant qu'elles sortent de ma bouche.

A la façon dont elle répète le mot « amis », je sais qu’elle n’y croit pas. J’ai bien envie de sortir un truc cool style « mais oui, un sexe friend quoi ! » mais sincèrement je ne suis pas sûre que cela arrangera la situation. Je me fais l’effet d’être une pauvre fille et à elle aussi sans aucun doute.
Tellement d’ailleurs qu’elle franchit les quelques pas qui nous séparent et me prend dans ses bras. Je dois vraiment faire peine à voir si elle réagit comme ça. Mon dieu… Et moi qui ne trouve rien de mieux à faire que de la serrer également contre moi, parce que mine de rien, ça fait du bien.

-T’en fait pas, je les ferais toutes fuir.
-T’es pas obligé…

-J’ai déjà commencé. Histoire de pouvoir dormir la nuit.
-Merci maintenant j’imagine à quel point il se donne avec les autres…

C’est une blague. Ou pas… Parce qu’en tant que future écrivaine, j’ai une imagination débordante et je n’ai aucun soucis à voir monsieur le directeur De Rothschild en compagnie d’une autre, sa secrétaire par exemple ou miss finance, l’idiote qui adore faire comme si en tant que stagiaire j’étais semblable à une plante.

-On est pas ensemble, enfin je veux dire, on a pas une relation avec des sentiments tout ça… Il est libre de faire ce qu’il veut… Et moi aussi.

Sauf que je ne vois personne d’autres moi. Il y a juste Léo, les bras de Léo, les caresses de Léo, les baisers de Léo…

Cette situation ne me dérangeait pas tant que je pouvais faire comme si mais Linn m’a mis la vérité sous le nez et c’est beaucoup plus difficile de faire l’autruche. Et puis merde ma fierté ! Je ne suis QUE la troisième. Je suis sur le podium mais avec la médaille de bronze ou alors ses semaines commencent le dimanche soir et auquel cas, je suis quatrième…

Bon, je m’égare.

-T’es pas obligé de les faire fuir, dis-je comme si de rien n’était. Mais si tu pouvais faire tout pour qu’il pète un plomb, je dis pas non …

Quoi ? Sous prétexte que j’étais totalement d’accord (à la base) avec notre relation, je n’ai pas le droit ? Oui ba si ! Vengeance féminine, tout ça …!

-Ecoutes, dis-je en reprenant mon sérieux. Est-ce que tu peux garder cette histoire pour toi ? Je veux dire c’est mon maitre de stage…

Oui bon la vengeance féminine à ses limites, je suis pas une garce à ce point.

A sa remarque je lève les yeux au ciel et pousse un profond soupir. Oh, arrête un peu ! Je n’ai pas dit ça parce que les autres sont … bruyantes. Disons simplement que son lit grince. Et c’est super chiant. Ma chambre est à côté. Après, il se contente peut être de sauter dessus juste pour me faire chier vues les remarques que je lui ai déjà faites hein… Je soupire et me passe la main dans mes cheveux en m’éloignant d’elle. Un sourire monte sur mes lèvres et je lève les yeux au ciel. Et puis, il ne faut pas avoir l’imagination débordante comme ça. C’est beaucoup trop… Horrible. Crois moi, j’ai le même. Genre quand j’imagine « mon » prof dans les bras d’une autre. C’est pas possible, je suis accroc ou quoi ? N’importe quoi. Je lève les yeux au ciel encore une fois.

Ecoute, Max. Je ne te demande pas d’explications. T’as pas à m’en donner. T’as envie de te taper mon voisin, bah, fais le. C’est pas moi qui vais juger… c’est vrai qu’on ne se connait pas tant que ça. Je me mords la lèvre inférieure et hausse les épaules. Pour être franche, tant que ça te convient, j’aurais jamais mon mot à dire. C’est ta vie, pas la mienne. M’enfin, vu sa tête, je ne suis pas sûre que l’option « couple libre » lui convienne réellement. On dirait qu’elle va fondre en larmes dans mes bras. Bah, au pire, comme c’est moi la gaffeuse internationnale, je la rattraperais. Foutu voisin. Foutues conquêtes. Bravo hein, dans quelle situation il m’a fourrée celui la ?

Quand elle me dit que je peux faire ce que je veux pour lui faire péter un plomb, un sourire narquois grimpe sur mes lèvres. Oh ben, si j’ai son autorisation alors, à défaut d’avoir celle de Nerwën, autant dire que je vais m’amuser. Réellement m’amuser. J’ai envie de m’acheter une batterie moi… C’est comme si c’était fait. J’ai déjà pas mal d’idées. Jouer au tennis contre le mur. Avec des balles qui font « gling gling » à chaque fois qu’elles touchent le mur. Je pourrais aussi mettre des films d’horreur bien fort, avec les enceintes collées contre le mur pendant qu’il est en pleine action… Heu, il faudra quand même que Max me dise quand elle est là… Parce que sinon je suis presque sûre que ça va lui couper l’envie avec elle aussi. C’est pas vraiment le but. Je suis une tombe. Promis, juré… Je cracherais bien mais après on va me faire payer le nettoyage de la moquette dans les charges alors…